Le concept fait sens pour ceux qui pensent que l’entreprise est un lieu où tous les collaborateurs sont partie prenante de sa réussite. Une entreprise au sein de laquelle chaque collaborateur prend toute sa place et où s’installe un climat de respect et de coopération. C’est une transformation somme toute inéluctable du fonctionnement des entreprises, au vu des questions de performance qui se posent à elles et des évolutions sociétales auxquelles elles sont confrontées.
Au plan économique, la performance des entreprises semble plus que jamais une affaire de collectif, afin d’être en mesure d’aborder le besoin d’innovation et de répondre à la complexité du monde. Sur le plan sociétal, le rapport au travail est aujourd’hui différent. Pour les jeunes générations d’abord qui souhaitent se réaliser dans leur métier et qui demandent à ce que leur contribution soit reconnue à sa juste valeur. Pour leurs aînés également, souvent confrontés à une perte de sens au sein d’entreprises où seule la performance financière semble compter.
Libérer les talents
L’entreprise libérée est souvent regardée sous l’angle de la philosophie qui la sous-tend et des bonnes pratiques à mettre en place dans les équipes. Mais ne va-t-on pas souvent trop vite en besogne ? À moins que l’implémentation de quelques méthodes à la mode ne soit que de la poudre aux yeux, au risque de désorganiser l’entreprise et désorienter les collaborateurs ?
Combien d’organisations veulent « mettre l’humain au cœur de l’entreprise », sans rien changer (hormis, parfois, l’installation de quelques baby-foot), ne donnant aucune impulsion à cette nouvelle dynamique ? C’est bien le sujet du dirigeant que de mettre en acte sa vision de l’entreprise, son projet, sa culture ; de faire vivre un collectif pour délivrer ce qui fait sa raison d’être, sa mission.
L’implémentation de nouvelles pratiques dans une démarche de libération des talents n’est pas si simple. Elle impacte l’ensemble du système : culture, leadership, organigramme, processus de communication, de prise de décision. Elle touche aussi la notion d’autorité, de délégation et de pouvoir.
Une entreprise libérée n’est pas une entreprise sans leader, sans règles, sans procédures. À partir du moment où un groupe s’organise, les liens d’interdépendance se tissent. Il y aura une zone de leadership, des normes pour assurer le fonctionnement, une culture propre qui donne notamment les codes de comportement au sein du groupe et favorise la cohésion. Dans une entreprise dite libérée, la structure de l’organisation au plan des processus relationnels favorise l’autonomie, la responsabilité et la coopération.
Comment éclairer le chemin vers de nouvelles pratiques ?
Des questions se posent pour le leader lorsqu’il souhaite implémenter de nouvelles pratiques dans l’entreprise, afin de valoriser pleinement le potentiel de ses collaborateurs :
- Quelle est la culture de mon entreprise ? Quels sont les éléments porteurs et les éléments de blocage dans un processus de libération des talents ?
- Quel est le style de leadership dominant ?
- Quelles sont ses forces et ses freins à la libération des talents ?
- Quelles sont les personnes clés qui influencent les comportements dans l’entreprise ?
- Quelles sont les personnes-ressources pour installer le changement ?
- Quelle est la dynamique des équipes ?
- Cette dynamique va-t-elle porter ou freiner la libération des talents ?
- Quelle est la culture du feedback ? Suscite-t-elle l’engagement ?
- Comment mesurer le degré d’engagement des collaborateurs ?
- Quel est le degré de confiance entre les acteurs de l’entreprise ?
Cette confiance, à la fois celle du dirigeant envers ses collaborateurs et celle des collaborateurs envers leur dirigeant, permettra de coconstruire une façon de fonctionner et des règles adaptées à l’activité de l’entreprise et à son environnement, afin que la nouvelle organisation en place soit portée par tous les collaborateurs. La qualité des relations de travail, signe d’une organisation claire et qui fait sens, devient alors un puissant levier de performance.
Comment implémenter au plus juste ces nouvelles pratiques ?
Il ne s’agit pas ici d’envisager que toutes les entreprises se convertissent à « l’organisation libérée ». Mais il parait inéluctable que toutes les entreprises doivent prendre en compte les évolutions sociétales et les enjeux liés à leur environnement économique, en implémentant quelques éléments d’un système organisationnel plus inspirant pour l’ensemble des collaborateurs et plus efficace pour l’entreprise.
Pour mettre en place des idées nouvelles sans casser la cohésion, déstabiliser les équipes, limiter leur engagement en créant confusion, défiance, conflit…, la dimension organisationnelle est la première donnée sur laquelle il est important de focaliser son attention pour libérer les énergies. Pour ce faire, il s’agit de mettre en œuvre une approche sur-mesure, basée sur une méthodologie d’accompagnement simple et pragmatique :
- Aider le leader à prendre du recul et regarder les éléments clés de son organisation
- Identifier les ressources sur lesquelles s’appuyer
- Cibler une première zone de changement qui tient compte de la réalité de l’entreprise, de ses enjeux, de sa dynamique
- Mettre en place une première action de changement
- Faire le point
- Passer à l’action suivante en tenant compte du rythme et des ressources de l’entreprise
Par ce travail de construction et de mise en place pas-à-pas, les leaders et managers pourront identifier les éléments (pour certains biens cachés) qui pourraient limiter ce processus de libération des talents et mener à bien les actions porteuses de la transformation.
Christian Paris, Directeur, Atorg